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Par FloydNexus le 20 Septembre 2019 à 19:04
Afin d’inaugurer comme il se doit ma présence sur ce magnifique site dédié aux RPG, je vous propose aujourd’hui quelque chose de différent de ce que vous pouvez trouver sur mon incommensurablement magnifique chaîne youtube. Nous allons jeter un œil sur le cas de Bethesda. Il s’agit d’une chronique et les avis présentés n’engagent que moi et ne découlent que de mon expérience personnelle de personne passionnée de jeu vidéo depuis les années 80.
A l’origine, le studio fondé en 1986 se consacrait à divers jeux sur Amiga, Atari st ou PC – DOS. Ils sont responsables, et même coupables, d’adaptations de films comme Home Alone (Maman j’ai raté l’avion) ou encore Terminator.
Mais au début des années 90, Christopher Weaver planche sur un jeu d’action où le joueur doit gérer une équipe de gladiateurs. Le joueur devait aller d’arène en arène afin de gagner argent et prestige.Xngine : Ni boisson, ni pantalon !
Les équipes de développement de l’époque étaient bien plus libres qu’aujourd’hui et à force de rajouter des villes, du terrain et des quêtes le jeu, pris le chemin d’un jeu de rôle action et fut donc retardé de quelques mois. Mais le changement de direction se fit dans la douleur et le jeu sorti truffé de bugs en mars 1994. Quoi? Un jeu Bethesda sorti buggé*?
Considérant Arena comme un brouillon, Bethesda continua sur sa lancée, et c’est en 1996 qu’arriva Daggerfall. Plus complet, plus ambitieux, plus ambitieux, plus vaste, plus... buggé ! Il s’agit néanmoins de l’aboutissement de ce qu’aurait du être Arena s’il n’était pas passé par nombre de remaniements avec en plus, une ambition démesurée pour l’époque. Un jeu en monde ouvert et dynamique immense avec des donjons buggés de manière procédurale. Enfin, générés de manière procédurale. Un jeu de rôle action dont le coté jeu de rôle est exigeant et complet, une liberté totale, une quête principale exigeante et des mécanismes complets et complexes. Ceux qui y ont joué à l’époque n’ont pu qu’être marqué par cette sensation de liberté et versent tous une petite larme en se remémorant les plaintes du fantôme du précédent empereur ne réussissant pas à trouver le repos... Venngeannnnce! (cri que reprirent certains joueurs après Fallout 4 et 76, mais nous y reviendront).
Je ne vais pas épiloguer sur Daggerfall qui est pour moi le meilleur Elder Scrolls, si l’on re-contextualise en l’ayant connu à sa sortie, et le meilleur jeu de Bethesda tout court parce que cela n’engage que ma petite personne.
Devant le succès de Daggerfall, Bethesda a tenté de décliner des variantes plus ouvertes au grand public tel que Daggerfall, An Elder Scrolls Legend : Battlespire. Pour résumer, il s’agit de reprendre le moteur et les assets de Daggerfall et de plonger le joueur dans une succession de donjons. A noter la présence d’un mod multijoueur qui n’était vraiment pas répandu sur ce type de jeu à l’époque.
Un mot sur la spécificité du système de jeu des Elder Scrolls. Contrairement à nombre de jeux de l’époque basés plus ou moins sur les règles de Dungeons & Dragons, le joueur peut tout à fait faire un personnage sur mesure sans limitation. Ici, faire un mage en armure lourde ne pose pas de problèmes si l’on accepte les pénalités idoines.
Enfin, en 1998, sort The Elder Scrolls Adventures: Redguard. Il s’agit d’un jeu d’aventure/action dans l’univers des Elders Scrolls. Ce sera le dernier jeu à utiliser le XnGine.
Il y eu ensuite de nombreux jeux, ce qui montre que, contrairement à ce que les mauvaises langues affirment, la diversification de Bethesda ne date pas de maintenant, ni même son envie de se hisser au rang de gros éditeur. Bethesda, depuis Daggerfall, a toujours été mu par une grosse ambition et ce ne sont pas leurs jeux de courses ou de sports, la création de Zenimax ainsi que les nombreux rachats de studios postérieurs** qui le démentiront.
Gamebrouillon
Le développement du prochain Elder Scrolls est lancé en parallèle et se heurte à de nombreux écueils techniques du fait de la création pour l’occasion, du moteur dont nous traînons les lacunes encore aujourd’hui : le Gamebryo.
Les retards pris sont conséquents et les ambitions sont revues à la baisse.Plus question de refaire un jeu aussi ambitieux que Daggerfall, le terrain de jeu est divisé par deux, le procédural ainsi que l’idée de départ de proposer plusieurs provinces, sont abandonnés.
Le jeu sort en 2002 et est édité par Ubisoft. Morrowind sort en France, dans un premier temps, dans une version VOST puis en VF. Il est ensuite porté sur la première Xbox et deux extensions de qualité sont développées : Tribunal et Bloodmoon.
Le jeu en lui-même est beaucoup plus accessible et touche un large public, il s’agit de la porte d’entrée dans l’univers des Elder Scrolls de beaucoup de gens. Même s’il est inférieur sur beaucoup de points à Daggerfall, son ambiance, ses personnages partiellement doublés ainsi que sa musique (magistrale, signée Jeremy Soule) en font le jeu de la série qui restera dans le cœur de beaucoup de joueurs.
Le coup de génie de Bethesda est de fournir un Kit de création qui permet au joueur de modifier le jeu ou de faire lui-même ses propres aventures, voire de corriger lui-même les bugs !En 2006, sort Oblivion, un des jeux canoniques de la série des Elder Scrolls qui fut le moins apprécié par les fans les plus anciens. Il se situe au niveau écriture et ambiance un cran en dessous de Morrowind dans un univers chevaleresque policé. Oblivion reste un excellent jeu et son extension Shivering Isle remonte encore le niveau mais l’écriture qui n’était déjà pas le fort des jeux Bethesda, est convenue et n’est aucunement rattrapée par l’ambiance qui cette fois est bien plus classique.
Oblivion restera aussi dans les mémoires pour son DLC d’armure pour cheval, tellement avant-gardiste sur la politique de DLC des autres studios que nous allions subir par la suite.
La guerre ne meurt jamais
Je ne vais pas détailler chaque jeu Bethesda mais traiter cela plus globalement, en s’intéressant à la direction qu’a décidé de prendre le studio.
A l’image de Bioware qui n’a plus de Bioware que le nom suite à son rachat par EA et au départ progressif de tout son personnel, Bethesda a simplifié tous les éléments de gameplay pour toucher un plus large publique. Skyrim avait déjà été victime d’un certain nombre de simplifications mais l’univers aidant, il s’est avéré que Bethesda avait eu raison de le faire tant le résultat final est cohérent et que la sauce prend tout simplement.
En ce qui concerne Fallout, là on part d’un univers purement rollistique, d’un vrai jeu de rôle vidéo-ludique dans le sens le plus pur du terme. Suite au rachat par Bethesda de la licence, le jeu fut adapté aux canons Betheda du genre (avec le Gamebry version Oblivion). Logique ! Que l’on aime ou non Fallout 3, il fut le résultat de cela. Si l’on prend du recul, Fallout 3 puis New Vegas (développé par Obsidian) furent ce que l’on pouvait attendre de mieux de cette fusion de l’univers Fallout avec le style de jeu Bethesda. Ce ne sont plus des Fallout mais des jeux de rôles action dans l’univers. Et Fallout New Vegas (développé par Obsidian avec le moteur de Bethesda) nous montre bien qu’il est possible de faire un superbe jeu, adulte et immersif, avec cette recette.
Retombées Radioactives***
A partir de Fallout 4, les choses se gâtent. Nous allons nous concentrer sur celui-ci car c’est un cas d’école. De fait, nous ne sommes plus devant un savant mélange des spécificités Fallout de Black Isle transfigurés par les canons Bethesda, mais devant une transformation totale.
Un certain nombre de simplifications et de raccourcis en font un FPS/aventure avec quelques éléments de jeu de rôle. Un peu comme la série Mass Effect de chez EA/Bioware qui a fait glisser la série de vrai jeu de rôle action à TPS/aventure avec quelques éléments de jeu de rôle pour le meilleur (Mass Effect 2) et pour le pire (Mass Effect 3).
Croyez-le ou non, le terme RPG, ou jeu de rôle, est vendeur. Et la confusion entretenue par les éditeurs ayant pour but de mettre ce terme en avant fait que certains sont capables de citer The Wolf Among Us en disant mordicus qu’il s’agit d’un jeu de rôle !
Voici quelques règles de base appliquées à Fallout 4 qui semblent se dégager et créer la confusion dans les gros jeux de rôles moderne :
-Quêtes simples et basées sur l’action : pour ne pas décontenancer le joueur de FPS avec des choix moraux
-Monde rétréci, ambiance parc d’attractions : le joueur ne doit jamais s’ennuyer et doit combattre toutes les X minutes, à l’image d’un FPS scripté ou d’un film d’action.
-Choix de dialogues limités ; le joueur ne doit pas hésiter ni prendre de temps dans les dialogues qui ne sont qu’une motivation pour continuer à aller tuer.
-Plus de quêtes à fin différente, plus de gameplay différents selon que le joueur veut la jouer badass ou gentil. Cela simplifie grandement le jeu pour l’ouvrir au plus grand nombre, diminue drastiquement les coûts de développement et annule toute replay value. Sur un nouveau run, le joueur fera la même chose de la même façon.
Pour contrebalancer cela, Bethesda a regardé ce qui fonctionnait, les tower defense et minecraft.
De cela résulte tout un pan du jeu qui certes, est chronophage, mais qui finalement ne serait le bienvenu que s’il était une addition et non devenu un pivot de gameplay au même titre que le reste. Le nombre de DLC qui lui est consacré en sont la preuve.
Tout cela ne serait pas si grave quand on parle de Bethesda, si des indicateurs alarmants ne s’étaient pas immiscés dans cette histoire.
Commençons par le partenariat avec Steam pour la monétisation des mods. Une catastrophe (déjà oubliée ?) qui malgré le rétro pédalage, fait que Bethesda prend un chemin que même EA aurait eu des scrupules à emprunter !
Consolations
Le Création kit pour Fallout 4 a tardé à venir car il se devait d’être prêt pour la Xbox one, mais pas seulement. Suite à leur échec de monétisation des mods, Bethesda et Steam ont fait cavalier seul. D’un côté s’est développé le Steam workshop et de l’autre le Bethesda création club. Quel en est l’enjeu ?
La possibilité un jour ou l’autre de se faire de l’argent sur le dos des modeurs bien sûr ! L’industrie sait être patiente et déjà le Création club fait un pas dans cette direction en habituant les nouveaux joueurs qui n’avaient certes pas l’habitude de moder leur jeu à leur client de moding, afin de préparer une éventuelle transition une fois la migration mûre dans la tête de ces nouveaux joueurs, surtout au niveau des consoles de jeu.
Au niveau des joueurs PC que nous sommes, cela apporte un handicap. Bethesda ne met pas à jour ses jeux mais le Création club. De fait, ces mises à jour cassent systématiquement -et comme par hasard- tout moding qui n’est pas fait avec le-dit Création club (en particulier le script Extender dont dépend nombres de mods mais je n’entrerais pas dans les détails).
Je vous laisse à vos déductions... Une solution ? Bloquer les mises à jour de Steam en tweakant ou attendre des jours les mises à jour du script Extender.
Et puisque l’on évoquait les consoles de jeu, parlons de la Playstation 4 et de l’entourloupe concernant les mods. Sony a littéralement trompé le joueur lambda. La problématique est que Sony ne voulait pas débourser le moindre centime au niveau de la sécurité pour vérifier que le contenu des mods ne soit ni de nature offensante, ni ne représente un risque de sécurité pour sa PS4 qui nous a déjà prouvé les lacunes de Sony en ce domaine. Ils ont donc tout simplement refusé dans un premier temps. Mini scandale, troll des joueurs Xbox One, etc. Ils ont donc dit oui à la présence des mods sur PS4 mais uniquement si ceux-ci utilisaient les assets du jeu. Pour faire court, on a des mods sur PS4 pour dire que la console supporte les mods, mais c’est tout. Et le nombre de commentaires que j’ai sur mes vidéos d’utilisateurs de PS4 qui se demandent pourquoi tel ou tel mod n’est pas disponible sur leur console, est sans appel : opération de com réussit ! Le grand public croit que la PS4 supporte le moding comme la Xbox one ou le PC.
Et maintenant ?..
En ce qui concerne Fallout 4 et ses simplifications/casualisations, quand on sait que le jeu s’est vendu à millions d’exemplaires, mais que seul plusieurs dizaines de milliers de joueurs y jouent encore, cela n’augure rien de bon. D’autant que le jeu souffre d’une forte aura de déception chez les « anciens » joueurs de Fallout 3/New Vegas et qu’en majorité (pas en totalité) les joueurs ayant principalement appréciés le titre, sont ceux arrivés à la série avec cet épisode : l’aura RPG, plus l’aura Fallout au service d’un jeu aux mécaniques grand public, à qui on a vendu un FPS/Aventure/Construction sous le label jeux de rôle hardcore.
Fallout 3/New Vegas se sont extrêmement bien vendus mais le mieux étant l’ennemi du bien, pourquoi ne pas détruire la licence pour vendre plus à court terme !?
A l’instar d’un chat devant un concombre, cela ne rend pas très optimiste quant au prochain Elder Scrolls. Le moding sur Fallout 4, n’a pas pu compenser un jeu casualisé dans sa structure même s’il a pu rendre l’expérience acceptable.
Ceci étant dit, nous ne sommes pas à l’abri d’un Todd Howard et d’un Bethesda qui se rendent compte que d’offrir un gameplay modulaire avec de simples options au démarrage d’une partie, peut éventuellement contenter le plus grand nombre et même si cela augmente les coûts de développement, c’est déjà un bon début pour réconcilier le grand public et les fans. Mais cela n’est pas très crédible.
La réalité économique c’est qu’ils ont fait plus d’argent, plus rapidement avec Fallout 4 qu’avec Skyrim/SE/legendary confondu.
Et cela les a menés en droite ligne à Fallout 76. Et bien non, je ne vais pas participer au lynchage de ce jeu mais cela nous interroge sur ce que sera le prochain Elder Scrolls. Le jeu part de bien moins loin en termes de choix moraux et de mécanismes de jeux, alors on peut se montrer optimistes si l’on sous-estime la capacité de Bethesda à se montrer décevant. Donc, soyons optimistes en étant pessimistes !
Il faut bien conclure... alors je citerais l’ami Gautoz de Gamekult dans sa conclusion du test de Fallout 76 en espérant que cela ne s’appliquera pas au prochain Elder Scrolls.
« C’est la fin d'un grand processus de nivellement technique et philosophique, l'avènement du Fallout apéritif. "Si vous n'êtes pas là, d'autres viendront" semble nous dire Bethesda. Eh bien, qu'ils y aillent ! »
*Oui j’écris buggé et non bogué, buggé viens de bug et à une histoire, bogué est une francisation de l’académie Française qui ne veut rien dire.
**Ici, le lecteur mal placé pourra interpréter cette partie de la phrase autrement, mais la volonté de l’auteur est bien de signifier qu’ils ont rachetés des studios avec leur postérieur, euh après, oui après !
***Fallouts!